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  • Au cours des dix années écoulées, la Grèce est parvenue à réduire rapidement son écart de revenu par rapport aux pays les plus performants, surtout si l’on tient compte de la révision récente du niveau du produit intérieur brut (PIB), qui se traduit par une hausse de 26 %. Cette révision est dans une large mesure le résultat d’une meilleure évaluation du niveau de l’activité dans le secteur des services en pleine expansion, alors que, contrairement à ce qu’ont laissé entendre de nombreux articles, la prise en compte des activités illégales représente moins de 1 % de PIB. Il est certes difficile de se faire une idée complète de l’expansion dans la mesure où des chiffres révisés n’ont pas encore été publiés pour la période antérieure à 2000, mais il est probable que la croissance du PIB par habitant a dépassé 4½ pour cent par an en moyenne au cours de la dernière décennie et que, de ce point de vue, la Grèce se situerait donc au deuxième rang des pays de l’OCDE, après l’Irlande.

  • Les comptes nationaux ont récemment fait l’objet d’une profonde révision, qui s’est traduite par une réévaluation du niveau du PIB réel de plus d’un quart depuis 2000. Il est important de bien cerner la nature de cette révision pour évaluer le processus d’expansion, mais l’absence de séries historiques comparables impose certaines limites. Au cours de la dernière décennie, la croissance du PIB par habitant a été l’une des plus rapides de la zone OCDE. La plupart des facteurs qui expliquent cette vigoureuse expansion – notamment les effets de la réduction importante des réglementations anticoncurrentielles sur les marchés de produits et la déréglementation des marchés financiers – ont un caractère temporaire. Deux questions importantes du point de vue des politiques publiques se posent donc. D’une part, la phase actuelle de forte croissance risque-t-elle de s’interrompre de façon brutale? D’autre part, quelles mesures y auraitil lieu de prendre en priorité pour assurer une croissance soutenue et durable?

  • La réduction du déficit budgétaire, ramené de 5 % du PIB en 2004 à moins de 3 % en 2006, est une réussite majeure. Les autorités prévoient une diminution plus progressive dans les prochaines années, un équilibre ou un excédent global devant être atteint en 2012 au plus tard. Cependant, l’assainissement budgétaire devrait se poursuivre, peut-être à un rythme plus rapide que prévu étant donné le niveau élevé de la dette publique, les perspectives favorables à la croissance de la production et les coûts budgétaires à long terme du vieillissement, qui sont parmi les plus élevés de la zone OCDE. Il n’y a pas encore de propositions spécifiques pour réformer les retraites, principale source de l’accroissement prévisible des dépenses publiques résultant du vieillissement, même si le gouvernement doit annoncer des mesures dans le courant de cette année. Différer l’assainissement des finances publiques, et surtout la réforme des retraites qui s’impose d’urgence, entraînerait des coûts à long terme considérables sous la forme d’une hausse de la fiscalité et d’un alourdissement du service de la dette, avec notamment une augmentation de la prime de risque appliquée à la dette publique. De surcroît, cela reviendrait à transférer une lourde charge fiscale aux générations futures. Les efforts d’assainissement devraient tendre surtout à réduire les dépenses primaires et à augmenter les recettes fiscales. Pour y parvenir, il convient en particulier d’accroître l’efficacité de l’administration publique, de s’attaquer à la fraude fiscale et de prendre d’autres mesures pour élargir encore la base d’imposition. Pour garantir la viabilité budgétaire à long terme, il faudra aussi engager des réformes d’envergure dans le secteur clé de la santé et décider promptement de lancer une réforme complète du système de retraite.

  • Une vaste réforme des pensions s’impose d’urgence pour assurer l’équilibre financier, éliminer les distorsions qui jouent contre la poursuite d’activité à partir d’un certain âge et traiter efficacement les problèmes de pauvreté. Premièrement, d’après les prévisions, d’ici le milieu du siècle les dépenses de pensions en Grèce devraient augmenter plus que dans tout autre pays de l’OCDE. Une réforme est indispensable non seulement pour assurer l’équilibre financier du système mais aussi parce que, sinon, les dépenses de pensions représenteront plus d’un cinquième du PIB (non révisé) et évinceront d’autres dépenses sociales nécessaires pour assurer la cohésion sociale et la réalisation des objectifs structurels. À en juger par les prévisions concernant d’autres pays de l’UE, on peut penser que tout ajustement impliquera avant tout une baisse des prestations de pensions par rapport au salaire moyen, encore que l’ampleur de l’ajustement pourrait être limitée par des mesures visant à réduire les phénomènes désincitatifs vis-à-vis de la poursuite d’activité à partir d’un certain âge et à fermer les nombreuses voies d’accès détournées à une retraite anticipée.

  • Le chômage demeure élevé, en particulier parmi les premiers entrants sur le marché du travail (principalement des jeunes) et ceux qui veulent s’y réinsérer (principalement des femmes), tandis que les chômeurs de longue durée représentent une importante proportion du total. Les pouvoirs publics pourraient faciliter l’entrée sur le marché du travail en réduisant les coûts salariaux minimums et en assouplissant la législation relativement stricte en matière de protection de l’emploi. Or, aucune de ces deux mesures ne figure au programme d’action du gouvernement. Le niveau du salaire minimum n’a rien d’exceptionnel en comparaison des autres pays. Cependant, en l’absence d’un taux de rémunération inférieur au minimum qui serait réservé aux jeunes, il apparaît relativement élevé pour ce groupe. Les effets défavorables qui en résultent sur l’emploi sont aggravés par des taux élevés de cotisations patronales de sécurité sociale. Une caractéristique singulière de la Grèce tient au fait que les salaires minimums légalement contraignants sont fixés par les partenaires sociaux et s’appliquent à l’ensemble de l’économie; en outre, le gouvernement peut sous certaines conditions étendre les conventions collectives au niveau de la branche ou de la profession pour couvrir la totalité d’une branche ou profession et non les seules parties à l’accord. En fixant les salaires minimums, les partenaires sociaux devraient prendre en compte les taux de chômage élevés des jeunes. Les cotisations de sécurité sociale sur les bas salaires ont été réduites en 2000, mais elles devraient être encore abaissées, le financement étant assuré par des compressions de dépenses. Il faudrait un système d’impôts et de prestations bien ciblé et non des taux de salaire minimum différenciés pour répondre aux besoins des titulaires de bas revenus chargés de famille.

  • Un système d’enseignement supérieur performant est essentiel à la formation de capital humain, à l’innovation et à l’assimilation des nouvelles technologies. En Grèce, toutefois, les résultats de ce système, mesurés à l’aune des critères internationaux, sont médiocres comme en témoignent le faible niveau des taux de diplômés, le nombre important de ressortissants nationaux qui partent étudier à l’étranger en dépit du faible coût des études en Grèce, et le faible volume des publications scientifiques. L’État est le seul producteur d’enseignement supérieur et son principal financeur, ce qui amène à s’interroger sur l’efficacité des dépenses publiques dans ce secteur. D’après les nouveaux indicateurs de l’OCDE, le cadre institutionnel actuel de l’enseignement supérieur ne correspond pas, tant s’en faut, aux meilleures pratiques. Ce système figure notamment parmi les plus centralisés et les moins souples de la zone OCDE. Le présent chapitre met en lumière les insuffisances du dispositif actuel et évalue la récente réforme du système universitaire. Ces projets représentent une étape nécessaire dans la bonne direction, car ils mettent l’accent sur la bonne gouvernance et instaurent un système d’évaluation. Toutefois, d’autres initiatives s’imposent pour remédier à toutes les déficiences observées, et plus particulièrement pour autoriser les universités privées et lier le financement à la performance. À un stade ultérieur, il faudra aussi envisager des réformes en profondeur du financement des étudiants.

  • La concurrence effective reste limitée dans les industries de réseau. Des progrès louables ont certes été accomplis en matière de privatisation totale ou partielle des entreprises publiques, mais l’engagement capitalistique de l’État dans les services publics essentiels reste fort, et la réglementation des prix est encore très répandue, en particulier dans le secteur des transports. Des problèmes substantiels se posent dans le secteur de l’énergie, où l’intégration verticale empêche l’instauration d’une véritable concurrence, malgré l’ouverture juridique du marché. Dans les télécommunications, le dégroupage de la boucle locale doit s’accélérer afin de faciliter l’accès aux services à haut débit et la diffusion rapide des technologies de l’information. La libéralisation du marché des services postaux se fait progressivement, conformément à la directive applicable de l’Union européenne. Le financement du service universel suscite toutefois de vives préoccupations. Dans le secteur des transports, la libéralisation des prix des billets de transbordeurs (ferries) en classe économie devrait stimuler la concurrence, mais la privatisation de la compagnie aérienne nationale se fait toujours attendre. La réglementation du secteur du fret routier demeure l’une des plus restrictives de la zone OCDE. Dans le secteur des chemins de fer, les pouvoirs publics doivent poursuivre les réformes pour favoriser la concurrence. La présence d’autorités de régulation efficace est essentielle pour garantir un accès non discriminatoire au réseau et stimuler la concurrence dans tous les secteurs récemment libéralisés.