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Une reprise économique très opportune est en cours en Italie. Après une progression du PIB en termes réels de 1.9 % l’an dernier – au-dessous de la moyenne pour la zone euro, mais au-dessus du taux potentiel – la croissance devrait se maintenir à ce rythme en 2007. Cette évolution tient en partie à une demande extérieure très dynamique, mais on voit également se manifester les premiers signes d’une amélioration plus fondamentale. Certains exportateurs italiens ont regagné des parts de marché à l’exportation pour les biens de consommation de haute qualité et les machines utilisées pour les produire, secteur dans lequel ils se spécialisent traditionnellement. La hausse rapide des prix à l’exportation est sans doute l’indice que ces entreprises ont récupéré une partie de leur pouvoir de fixation des prix et ont opéré une montée dans la gamme, au profit des produits plus chers. Mais d’autres entreprises ne se sont pas restructurées, n’ont pas innové ou n’ont pas externalisé et doivent réduire encore leur voilure, comme le montrent la baisse globale de la rentabilité et les nouvelles pertes, dans l’ensemble, de parts de marché à l’exportation. La structure de l’économie italienne à l’exportation demeure fortement axée sur la production à faible qualification, ce qui expose l’Italie à la concurrence des économies de marché émergentes et continue donc de pénaliser la croissance.
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L’économie italienne s’est sensiblement redressée en 2006. La croissance s’est maintenue largement au-dessus de son taux potentiel, ce qui s’est traduit aussi par une forte baisse du déficit public. Le principal élément moteur a été la vigueur de la demande étrangère et un effort d’ajustement manifeste de la part des exportateurs italiens, qui ont pu ainsi tirer parti de la conjoncture extérieure plus favorable. Malgré tout, les exportations de l’Italie restent dominées par les activités de production à faibles qualifications et elles subissent donc de plein fouet la concurrence par les coûts des économies de marché émergentes. Le processus de désindustrialisation n’a pas en outre entraîné un essor des activités de services comme dans certains autres pays plus performants de l’OCDE. Cette faiblesse macro-structurelle peut être imputée à une stagnation de la productivité totale des facteurs, due à un manque d’efficience et d’innovation en matière de produits et de procédés. Les autorités auront pour tâche principale de renforcer le capital humain et la concurrence sur le marché, afin de stimuler à la fois l’offre et la demande d’innovation et de compétences, insufflant ainsi à l’économie le dynamisme dont elle a besoin. La création d’emplois a été une des principales évolutions positives, mais il faut poursuivre l’effort dans ce domaine en rééquilibrant la législation relative à la protection de l’emploi, afin de réduire la dualité du marché du travail. Les larges disparités régionales et un taux d’activité toujours faible sur le marché du travail officiel font sans doute partie du problème actuel, mais il en résulte une importante déperdition du potentiel de croissance. Pour réduire l’effet de freinage de la politique budgétaire sur l’économie, il faut maintenir un rythme rapide d’assainissement des finances publiques au-delà de la reprise actuelle, tout en améliorant la qualité des dépenses afin d’en diminuer le volume et d’abaisser les ratios impôts-PIB.
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La croissance de la productivité s’est nettement ralentie depuis le milieu des années 90 en Italie. Les causes de ce ralentissement ne sont pas tout à fait claires, mais il est probable que le manque de concurrence sur les marchés de produits ait joué un rôle clé à cet égard. Les deux récentes vagues de libéralisation sont donc bienvenues. Ces réformes devraient non seulement réduire les barrières à l’entrée et les rentes dans un certain nombre de secteurs des services, mais elles pourraient également avoir une incidence positive sur d’autres branches d’activité. Néanmoins, il est possible de renforcer encore le jeu des mécanismes du marché. Ainsi, la mise en place de nouveaux organismes chargés de la concurrence au niveau local, ayant pour principal objectif de protéger les intérêts des consommateurs, pourrait contribuer de manière essentielle à stimuler les secteurs du commerce de gros et de détail, ainsi qu’à améliorer la transparence des services locaux d’utilité publique. De même, l’Italie a besoin de davantage de concurrence dans le secteur financier, pour stimuler l’innovation et la productivité ; à cet égard, les récentes réformes du secteur bancaire semblent prometteuses.
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Le déficit budgétaire de l’Italie s’est contracté l’an dernier et de nouvelles améliorations devraient intervenir avec la mise en oeuvre du budget de 2007. Il s’agit d’une évolution bienvenue, qui découle à la fois du dynamisme inattendu des recettes et d’une plus grande maîtrise des dépenses. Néanmoins, la situation des finances publiques reste difficile. Dans la zone de l’OCDE, l’Italie n’est dépassée que par un pays pour ce qui est du ratio de la dette publique, sans que rien n’indique qu’un recul significatif est possible, ce qui rend le budget sensible à des hausses soudaines des taux d’intérêt et à des modifications du sentiment du marché. La pression modérée exercée sur les dépenses par le vieillissement démographique atténue quelque peu les risques pour la viabilité budgétaire, mais il faudra à cet égard que soient pleinement appliquées les mesures d’ajustement des prestations de retraite, qui ont été approuvées mais n’ont pas encore été totalement mises en oeuvre. Les taux d’imposition sont élevés par rapport aux autres pays, de sorte que la consolidation ne doit pas être fondée sur de nouvelles augmentations des impôts, mais s’appuyer sur une meilleure maîtrise des dépenses. Dans ces conditions, il n’y a pas d’autre choix qu’un assainissement budgétaire décisif. Il faut se féliciter de l’objectif des autorités de ramener l’excédent primaire au niveau observé au moment de l’entrée dans l’UEM, à savoir 5 % du PIB ; s’il est prévu d’atteindre ce niveau d’ici à 2011, les bons résultats budgétaires enregistrés récemment devraient permettre de parvenir à ce résultat avant cette date. Les premiers signes d’amélioration enregistrés l’an dernier et attendus cette année sont encourageants. Mais le chemin à parcourir reste ardu.
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Le fédéralisme budgétaire peut être un précieux complément des réformes structurelles et des mesures d’assainissement budgétaire. Donner plus de pouvoirs aux administrations infranationales tout en faisant en sorte qu’elles rendent des comptes à leurs administrés pour l’utilisation des recettes fiscales pourrait améliorer la répartition des ressources publiques et favoriser un rattrapage dans les régions en retard. L’Italie s’est lancée sur la voie du fédéralisme en décentralisant les dépenses, les pouvoirs réglementaires et les attributions fiscales à la fin des années 90 et en renforçant les responsabilités croissantes des niveaux inférieurs d’administration par la réforme constitutionnelle de 2001. Mais les nouvelles dispositions constitutionnelles ne sont pas encore pleinement appliquées. Le gouvernement a l’intention d’y remédier. Il faudrait maintenant mettre davantage l’accent sur le volet financier, c’est-à-dire faire mieux concorder les obligations de dépenses et les compétences fiscales, de manière à renforcer l’autonomie et la responsabilité des autorités locales conformément aux objectifs des réformes fédéralistes. Les niveaux infranationaux d’administration, qui ont totalement en charge les soins de santé et la dépendance des personnes âgées, devront faire face à de très fortes pressions du fait du vieillissement de la population, particulièrement rapide en Italie ; il faudrait donc leur décentraliser plus de pouvoirs fiscaux, sachant en particulier que la réforme des retraites a réduit les pressions qui s’exercent sur l’administration centrale. Il faudrait revoir les mécanismes de redistribution dans la perspective d’un plus grand effort fiscal et, dans ce contexte, l’Italie devra décider dans quelle mesure elle peut véritablement se permettre de garantir des niveaux nationaux uniformes de prestation des services publics – et, à l’inverse, quelle différenciation régionale des services elle tolérera en vue d’une plus grande efficience. Il faut renforcer les conditions cadres, en particulier les règles comptables, qui doivent être améliorées et normalisées. On pourrait obtenir plus de discipline budgétaire dans le cadre du Pacte de stabilité interne avec une meilleure coordination ex ante et de plus lourdes sanctions ex post.