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Santé mentale : le défi de la Finlande

Dernière mise à jour : 25 juillet 2019

Nous pouvons tous connaître un problème d’ordre mental à un moment donné dans notre vie. Dans l’Union européenne, les maladies mentales concerneraient une personne sur six. En Finlande, où leur fréquence est la plus élevée d’Europe, près d’une personne sur cinq serait touchée. Les troubles de la santé mentale engendrent un coût important : prise en charge, régimes de sécurité sociale, baisse de l’emploi et perte de productivité s’élèvent à près de 4 % en moyenne du PIB des pays de l’UE. En Finlande, le coût estimé est encore plus élevé, atteignant 5.3 % du PIB en 2016.

Qu’est-ce que la santé mentale ?

Une personne jouissant d’une bonne santé mentale peut gérer les aléas de la vie, être productive au travail et apporter sa contribution à la société. Une mauvaise santé mentale est, quant à elle, caractérisée par une moindre capacité à affronter les événements. En Finlande, comme dans d’autres pays de l’UE, les troubles mentaux les plus courants sont les troubles anxieux et dépressifs, qui touchent respectivement 4 % et 6 % des Finlandais. Les troubles liés à la consommation d’alcool et de drogues concernent également 4 % de la population finlandaise, un chiffre bien plus élevé que la moyenne de l’UE-28 de 2.4 %. Ces maladies, si elles ne durent parfois que quelques semaines ou quelques mois, peuvent persister toute la vie. Il en va de même pour la schizophrénie et les troubles bipolaires, qui touchent généralement moins de personnes, environ 1.2 % de la population.

Les troubles de la santé mentale concernent tout le monde, indépendamment des ressources, du sexe et de l’âge. Toutefois, certains groupes sont particulièrement vulnérables. Par exemple, les femmes sont plus touchées par les deux troubles mentaux les plus répandus, l’anxiété et la dépression, qui concernent 5.4 % et 4.5 % de la population de l’UE. À l’inverse, les hommes sont deux fois plus susceptibles de connaître des troubles liés à la consommation d’alcool ou de drogues, troisième pathologie mentale la plus répandue dans l’UE, avec 11 millions de personnes concernées. La situation socioéconomique exerce également une influence. En Finlande, en effet, les hommes aux revenus les plus faibles sont près de cinq fois plus susceptibles de souffrir d’une dépression chronique que les hommes aux revenus les plus élevés.

Finland's mental health challenge chart
Finland's mental health challenge chart

OECD/EU (2018): Health at a Glance: Europe 2018

En 2015, dans les pays de l’UE, on comptait un décès toutes les six minutes par suicide ou par accident lié à une maladie mentale. Cette même année, chaque jour, environ neuf jeunes de 15–24 ans mettaient fin à leurs jours. Le fait est que la Finlande, grâce à une action concertée ces trente dernières années, a largement fait reculer le taux de suicide. À partir des années 80, la Finlande a élaboré une série de stratégies nationales pour lutter contre ce fléau. Le gouvernement a mis en place un numéro d’urgence et a donné aux médias des recommandations, précisant notamment que la méthode de suicide ne devait pas figurer dans les informations. Les pouvoirs publics ont récemment porté leurs efforts sur l’amélioration de la prise en charge des maladies mentales, faisait tomber le taux de suicide en Finlande de plus de la moitié.

Prévenir et traiter les troubles mentaux

Le choix de la Finlande de développer plus largement l’offre de services en santé mentale, sans cibler uniquement la prévention du suicide, explique cette réussite. Le gouvernement s’est concentré sur les facteurs de risque du suicide : dépression, manque d’accès aux soins, consommation abusive de drogues et d’alcool et facilité d’accès aux moyens létaux. La Finlande a également créé une plateforme en ligne dédiée à la santé mentale qui propose, par exemple, des thérapies comportementales et cognitives pour les troubles mineurs partout dans le pays.

Le taux de suicide étant particulièrement élevé chez la population masculine, les actions menées ont ciblé les jeunes hommes vulnérables au moyen de campagnes telles que « Temps écoulé ! Il faut avancer » (Aikalisä! Elämä raitelleen). Cette stratégie a-t-elle porté ses fruits ? Curieusement, entre 1986 et 2016, la consommation d’antidépresseurs, qui est un indicateur approximatif, il faut le reconnaître, de la prise en charge des troubles mentaux, a été multipliée par 13 et a beaucoup augmenté pendant les vingt premières années, avant de se stabiliser ces dix dernières années environ.

En dépit de ces progrès, 750 Finlandais environ se donnent la mort chaque année. L’écart qui sépare le taux de mortalité de la population générale et celui des personnes présentant un trouble mental, facteur de risque du suicide, est considérable. La Finlande a mis en place une nouvelle Stratégie nationale de santé mentale et alloué un budget de 300 000 EUR à la prévention du suicide. Mais il serait opportun d’investir davantage dans la santé mentale, ne serait-ce que pour réduire le coût élevé de ces pathologies.

Bonne nouvelle : dans les pays de l’OCDE, la parole sur la santé mentale se libère peu à peu. Il s’agit d’une avancée majeure pour vaincre les clichés sur les troubles mentaux et aider les malades à bénéficier du soutien et de la prise en charge dont ils ont besoin. En Finlande et dans le reste de l’OCDE, il faut néanmoins faire plus encore pour prévenir l’apparition des troubles mentaux, améliorer le quotidien des malades et réduire la mortalité précoce.

©L’Observateur de l’OCDE, avril 2019

Références

OCDE (2015), Santé mentale et insertion professionnelle : De la théorie à la pratique, Santé mentale et emploi, Éditions OCDE, Paris. https://www.oecd-ilibrary.org/employment/sante-mentale-et-insertion-professionnelle_9789264242074-fr.

OCDE (2014), Making Mental Health Count: The Social and Economic Costs of Neglecting Mental Health Care, Études de l'OCDE sur les politiques de santé, Éditions OCDE, Paris. https://www.oecd-ilibrary.org/fr/social-issues-migration-health/etudes-de-l-ocde-sur-les-politiques-de-sante_20743211.

OCDE/UE (2018), Health at a Glance: Europe 2018: State of Health in the EU Cycle, Éditions OCDE, Paris/UE, Bruxelles https://www.oecd-ilibrary.org/fr/social-issues-migration-health/health-at-a-glance-europe-2018_health_glance_eur-2018-en

Patana, P. (2014), "Mental Health Analysis Profiles (MhAPs): Finland", Documents de travail de l’OCDE sur la santé, n° 72, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/ https://doi.org/10.1787/5jz1591p91vg-en.

Patel V Saxena S Lund C Thornicroft G Baingana F et. al. (2018), “The Lancet Commission on global mental health and sustainable development”, The Lancet, 2018 vol. 392 (10157) pp. 1553-1598. https://doi.org/https://doi.org/10.1016/S0140-6736(18)31612-X

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