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  • La fragmentation internationale de la production sur les chaînes de valeur mondiales (CVM) remet en question notre manière de considérer l’économie mondiale. Il est essentiel de comprendre leur fonctionnement, leur incidence sur la performance économique et la marge de manoeuvre de l’action publique pour aider les pays à mieux en tirer profit. Cette publication présente les principales observations et implications en termes de politique publique mises en évidence par les travaux que l’OCDE a consacrés aux CVM, notamment en ce qui concerne les politiques commerciales, les politiques d’investissement et d’innovation, ainsi que les politiques générales et structurelles qui déterminent selon quelles modalités et dans quelle mesure les pays, y compris les économies émergentes et en développement, peuvent tirer profit de leur participation dans les chaînes de valeur mondiales.

  • Aujourd’hui, la croissance et l’emploi dépendent moins de ce que l’on vend (le produit final) que de ce que l’on fait (les activités menées par une entreprise ou un pays). Les chaînes de valeur mondiales (CVM) permettent aux entreprises et aux économies de « prendre en charge » la partie du processus qu’elles maîtrisent le mieux, en utilisant des biens et services intermédiaires provenant d’ailleurs sans avoir à développer toute une industrie. Elles affectent la compétitivité et les courants d’échanges et d’investissements des pays, elles offrent des possibilités de développement dans les pays moins avancés, mais elles impliquent aussi des risques.

  • De plus en plus, les entreprises morcèlent leurs processus de production et répartissent les activités de production dans de nombreux pays. Les chaînes de valeur mondiales (CVM) qui en résultent modifient radicalement le visage de la mondialisation économique. La réduction des obstacles au commerce et à l’investissement, la baisse des coûts de transport et les progrès des technologies de l’information et des communications facilitent la fragmentation de la production de biens et services et la délocalisation de certaines activités et tâches dans d’autres pays. Des données récentes mettent en évidence l’essor rapide des CVM, la participation et le positionnement des différents pays et le rôle joué par les grandes et petites entreprises. Pour tirer pleinement parti des effets positifs des CVM et minimiser les coûts d’ajustement potentiels, il est nécessaire de repenser les politiques publiques en matière de mondialisation économique.

  • La fragmentation internationale de la production s’est accentuée au cours des dernières décennies, remettant en cause la vision et l’interprétation traditionnelles des échanges commerciaux. La mesure classique du commerce international consiste à enregistrer les flux bruts de biens et de services chaque fois qu’ils traversent une frontière. Dans un monde caractérisé par les chaînes de valeur mondiales (CVM), cette méthode aboutit, selon de nombreux observateurs, à un comptage multiple des échanges, qui peut conduire à l’adoption de politiques inappropriées. Les estimations des flux d’échanges en valeur ajoutée (ÉVA) calculées par l’OCDE et l’OMC offrent, dans le contexte des CVM, une meilleure interprétation des échanges. La base de données ÉVA peut en outre encourager l’établissement de statistiques nationales qui reflètent mieux l’interdépendance entre les pays.

  • Le présent chapitre décrit les enjeux que constituent les chaînes de valeur mondiales (CVM) pour la politique commerciale traditionnelle et les principales implications de la fragmentation accrue des processus de production pour l’action publique. Il a pour but de clarifier certaines notions, de proposer des analyses nouvelles et d’aider les responsables politiques à se saisir des problématiques nouvelles requérant une attention particulière dans le contexte des réseaux de production mondialisés.

  • L’investissement international est un des éléments clés des chaînes de valeur mondiales (CVM). Les entreprises multinationales déplacent constamment les ressources d’un pays à un autre et opèrent des restructurations géographiques de leurs activités par le biais d’investissements et de désinvestissements internationaux. Au cours des dernières décennies, les entreprises ont eu tendance à recentrer leurs investissements sur leurs activités de base et les pouvoirs publics sont devenus des acteurs de plus en plus importants de l’investissement international dans les CVM. Ces évolutions structurelles de l’investissement international soulèvent un certain nombre de (nouvelles) questions pour l’action gouvernementale, y compris la formulation de politiques H64d’investissement appropriées.

  • Les économies émergentes, et la République populaire de Chine en particulier, jouent un rôle croissant dans l’économie mondiale d’aujourd’hui. Cela résulte en partie des chaînes de valeur mondiales (CVM), qui permettent aux pays de s’intégrer à l’économie mondiale plus rapidement que dans le passé. Afin de réduire leurs coûts, notamment de main-d’oeuvre, et de bénéficier de la taille ou de la croissance de ces marchés, les entreprises ont réimplanté des grandes parties de leurs chaînes de valeur dans les marchés émergents. L’implication mondiale croissante des économies émergentes contribue à une augmentation rapide des exportations, de l’emploi et de la croissance économique dans ces pays. L’intégration dans les CVM n’est qu’un des ressorts, certes important, du développement économique. Spécialisés dans les activités à forte intensité de main-d’oeuvre et à bas coût, les pays émergents ou en développement s’efforcent de plus en plus de s’élever dans la chaîne de valeur.

  • En intégrant les entreprises et les pays aux réseaux de production internationaux, les chaînes de valeur mondiales (CVM) remettent en question la pensée gouvernementale en vigueur concernant la compétitivité. Les interconnexions croissantes vers l’amont et vers l’aval dans les CVM augmentent l’interdépendance des politiques de compétitivité des pays et limitent l’efficacité des politiques nationales. Pourtant, dans de nombreux pays, on appelle à de « nouvelles » politiques industrielles, souvent pour soutenir des industries particulières, notamment dans le secteur manufacturier. Les politiques défensives visant à protéger des industries ou des entreprises à l’intérieur du pays sont toutefois de plus en plus inefficaces dans un monde de CVM, alors que l’externalisation et la délocalisation renforcent la compétitivité nationale à l’exportation en donnant accès à des intrants moins chers, plus différenciés et de meilleure qualité.

  • Le capital intellectuel est devenu un facteur de succès dans les chaînes de valeur mondiales (CVM). La valeur créée par une CVM est inégalement répartie et dépend de la capacité des participants de fournir des biens et services élaborés et difficiles à imiter. De plus en plus, ces biens ou services découlent de certaines formes de capital intellectuel telles que les marques, la R-D de base, le design ou l’intégration complexe de logiciels aux structures organisationnelles. Le capital intellectuel permet aussi aux entreprises de façonner l’architecture d’une CVM afin de s’approprier une plus grande part de la valeur créée. Les responsables publics dans les pays de l’OCDE et dans beaucoup d’économies émergentes mettent ainsi de plus en plus l’accent sur les investissements en capital intellectuel de manière à s’élever progresser vers des segments de CVM à plus haute valeur et améliorer leur position dans la chaîne de valeur.

  • Avec la mondialisation, des risques locaux deviennent plus facilement des risques mondiaux. Depuis peu, les chaînes de valeur mondiales (CVM) se sont révélées des voies de contagion importantes, du fait de leur nature de réseau planétaire. Des chocs locaux de la demande ou de l’offre qui naissent dans une partie de l’économie mondiale peuvent s’étendre rapidement au monde entier. Des dérèglements mondiaux comme la crise financière de 2008 ou le tremblement de terre japonais de 2011 ont attiré l’attention des responsables publics sur les risques systémiques mondiaux potentiels. Si les entreprises sont en première ligne pour gérer les risques des CVM, les gouvernements ont eux aussi un rôle important à jouer, car les perturbations des CVM peuvent avoir des implications politiques, économiques ou sécuritaires majeures pour les économies nationales. Une approche multipartite à l’échelle internationale peut accroître la rapidité et l’efficacité de la préparation pour, et des réponses à, de telles perturbations.